Teddy Bear

Petit aparté sur un non-événement : Teddy Riner a remporté le tournoi de Paris qui a réuni, ce dimanche, quelques-uns des plus beaux spécimens du judo mondial. De beaux bébés qui oscillent entre 120 et 190 kilogrammes - je dis "gramme" pour amincir, c'est trompeur !

Le jeune judoka a vaincu, haut la main. R.A.S, c'était prévu. Un nouveau titre pour le triple champion du monde. Même si celui-ci est purement honorifique, il compte malgré tout car le tournoi parisien est l'un des mieux cotés au monde, un passage quasi-obligé pour les combattants qui souhaitent garder la main ailleurs que sur le col de leur adversaire ou s'étalonner avant les compétitions officielles.

Teddy Riner a mené la vie dure aux adversaires qu'il a croisés sur le tatami. A se demander si, au lieu de kimonos, ce ne sont pas plutôt des robes de chambre que ceux-là portaient tant ils n'ont jamais semblé préparés à affronter la "bête". Allez savoir ! Teddy a peut-être eu la même idée et, de peur d'avoir raison, aura veillé à leur laisser au moins la tunique sur le dos...

Là où pour tout homme normalement constitué, la couleur de la ceinture est un motif légitime de crainte et d'amitié, elle n'est pour notre champion national qu'un amusement, la promesse d'un bon moment à passer. Une chose excitante. Une excitation qu'on parvient à deviner dans l'article que l'Equipe lui a consacré lundi dernier. Petit florilège de ce que disent de lui ses infortunés compagnons d'entraînement ou de sélection, c'est selon : "Etre opposé à lui, c'est quasiment l'assurance d'avoir mal". "J'ai déjà éprouvé le sentiment de ne pas tirer dans la même catégorie que lui". "Contre lui, tu es obligé d'être à 120%, sinon tu apprends ce que c'est que la misère". Et ma préférée : "Aujourd'hui, quand il veut choper ta manche, tu ne peux pas l'en priver. Et quand il la tient, c'est presque impossible de le faire lâcher".

Teddy Riner me fait penser à un gentil géant qui jouerait avec des jouets. A mi-chemin entre ce petit chat mignon qui s'amuse d'une souris en sursis et ces personnages de manga dont la jeunesse n'est jamais un obstacle à leur statut de héros. Des générations de Sangoku insouciantes, qui ne savent pas encore bien de quoi elles sont capables. Les autres le devinent pour eux et c'est l'essentiel. Teddy est de ceux-là, sauf qu'il est vrai - comme Federer ? Une espèce de force tranquille, impassible et rigolote tant qu'on reste en dehors de sa cour de récréation. Le genre de héros qui suscite la sympathie, et pas seulement celle qui est forcée. La sympathie et l'admiration de tous.