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Objectif sport
8 janvier 2010

Parlons foot (acte I, scène 1)

12h34. Paris, bvd de Grenelle, 4e étage d'une tour de verre -

des individus sont assis autour d'une table. Le sélectionneur n'est pas là.

"Enfin, c'est à s'en bouffer les ongles ! Comment est-ce possible ? Comment, avec une telle génération dorée, autant de joueurs de grande classe... ? Comment ?

- On joue la peur au ventre ! Regardez l'Irlande !

- ... Et dire qu'on a été champions du monde avec Stéphane Guivarch !

- Ca, Guivarch... Quand il marchait, il marchait, mais quand il ne marchait pas..."

- Fin -

Ceux qui ont raté l' épisode 1 (et que ça intéresse !), cliquez ici !

C'est vrai, ça ! Sur le papier, les Bleus ont une attaque de feu. Le top niveau mondial. Pourtant, il y a bien longtemps que nous n'avons plus vibré avec les Bleus. Les attaquants ne courent plus dans le bon sens, le jeu est immobile, apathique, ennuyeux. Ajoutons un manque cruel de présence devant les buts, et voici dépeint le portrait du jeu français post-zidanien. Alors quoi ?

Meli et Melo sont dans un bateau

AttaquantsEn sélection, l'habitude - bonne ou mauvaise - a été prise de ne plus retenir que les meilleurs attaquants, ceux qui jouent dans des grands clubs et dont le nom, seul, vaut un billet pour Clairefontaine. A croire que la carte de visite pèse davantage que les compétences. Il y a des exceptions : Gignac, Rémy, Briand, qui méritent une place dans l'autocar, aux côtés de Benzema, Anelka, Henry... ou de Trezeguet. C'est, en effet, rendre justice que de convoquer tout ce monde sous la tunique bleue, certains pour être titulaires - hiérarchie oblige -, d'autres pour les voyages qui, dit-on, forment la jeunesse. Il faut bien préparer l'avenir.

Voici donc une brochette d'incontournables, assis dans un bus, direction le stade. Question : n'y a-t-il pas risque d'embouteillage à l'arrivée, si ce n'est dans le vestiaire, sinon sur le terrain ?

ticketLe 4-2-3-1 a ceci de contrariant qu'il n'offre normalement - pour le puriste - qu'1 seul ticket aux attaquants. Ignorer cette règle, demander à ces derniers d'occuper les 3 postes situés en soutien du 1, c'est commettre une erreur grave dans la compréhension du football. Ce serait oublier que chaque poste répond à un besoin précis et qu'il requiert des compétences particulières. Si, derrière le 3, se cachent des attaquants, le système devient un 4-2-4 et les mouvements sur le terrain ne doivent plus être les mêmes. L'animation change.

La culture du détail

L'idée de départ est simple : si l'on conserve un squelette de 4-2-3-1 avec des joueurs bâtis pour un 4-2-4, on tord soit les joueurs, soit le squelette, mais on tord quelque chose. Et rien de tordu ne peut tenir convenablement ni durablement. Je ne sais si l'homme est ou non "une marchandise comme les autres", mais, en tout cas, lui et son voisin ne sont pas purement et simplement substituables.

Passons à la pratique, elle aide à éclaircir les idées. Voici ce qui correspond à l'équipe-type de Raymond, complétée des doublures. Celle qui se dessine après la campagne de qualification au prochain Mondial.

Terrain_4231_Domenech_Rempla_ants

Lloris semble vissé à son poste de gardien. Justifié au vu de son début de saison et de ses sorties décisives avec les Bleus. Merci Hugo. On oublie vite qu'il vient d'avoir 23 ans, ce qui est bon signe.

En défense, ils sont quatre (4). Au centre, la patte gauche et le physique d'Abidal font flancher le coeur du sélectionneur, qui voit dans ces deux atouts le complément idéal de l'indétrônable Gallas. Ca se tient sur le papier davantage que sur le terrain, mais le choix, au moins, est fondé tactiquement. Tant pis pour les carences défensives du Barcelonais. Sur les côtés, Sagna en double d'Evra. R.A.S. ou presque (lisez, si vous voulez, l'acte I, sène 2).

LassDevant la ligne Maginot, deux combattants (2). Raymond a toujours cru en Lassana Diarra et le temps lui a donné raison. Il l'associe généralement à Toulalan, un autre guerrier aux trois ou quatre poumons. Deux profils défensifs et redondants, donc assez peu complémentaires. Le sélectionneur veut un verrou devant la défense, il l'a. C'est son choix.

Jusqu'ici, le 4-2-3-1 est respecté dans sa philosophie. Jusqu'ici, en effet, le gardien garde ses cages, les arrières latéraux jouent sur les côtés - fermons  les yeux, pour le moment, sur le cas d'Eric Abidal - et les milieux défensifs sont à leur place.

Passons aux milieux offensifs (3). Aïe, ça se gâte... Pas pour Gourcuff, qui occupe le milieu du milieu. Rien que de très normal pour un meneur de jeu, un 10 à l'ancienne. Qu'Henry se tienne à sa gauche a tendance à me chatouiller gentiment, mais que Ribéry soit à sa droite me gratte plus sérieusement.

Au milieu peut bien couler une rivière, mais pas Henry

 On pourrait croire, d'une certaine façon, que Titi renoue avec ses premières amours monégasques en se déportant sur le côté gauche. Ce n'est qu'à Turin, puis surtout à Londres qu'il a appris à jouer véritablement devant. Mieux, on penserait volontiers qu'il occupe le même rôle qu'à Barcelone.

Henry96Rien, cependant, n'est plus approximatif. Au Barça, sa position est davantage celle d'un attaquant excentré. Les Catalans, ne l'oublions pas, jouent en mode 4-3-3. Ils font la différence entre un milieu offensif, fût-il à gauche, et un ailier. La différence se mesure en terme de replacement et de contribution au travail défensif.

Avec les Bleus, Raymond Domenech lui demande de participer - sans relâche - aux tâches défensives. Captain Henry s'exécute, mais l'énergie qu'il y dépense est aussi celle qu'il ne dépense pas pour ce qu'il sait faire de mieux et qui se trouve dès lors perdue. Or, à son âge, les kilomètres commencent à être longs et la fatigue peut vite rejaillir sur son rendement. On préfèrerait tellement le voir mettre son expérience au service de son plus grand talent.

Un demi-Ribéry

 Quand il n'est pas blessé, c'est Kayser Franck qui occupe le flanc droit. Il excelle dans un rôle de feu follet imprévisible et possède de vraies qualités de toucher de balle, de passe et de provocation. Rien d'anormal, par conséquent, à le retrouver dans un rôle de milieu offensif ; c'est ce qu'il est naturellement.

Rib_ryOui, mais voilà, Franky n'a de cesse de crier à l'oreille de Raymond qu'il n'aime pas jouer à droite, qu'il n'en veut plus. Un sélectionneur n'a pas à dire systématiquement "amen" aux caprices des stars,  mais résister n'est pas non plus toujours faire preuve d'une grande intelligence tactique. C'est, en l'occurrence, accepter de tirer un trait sur le meilleur rendement du joueur.

Ribéry à droite, c'est pas mal, c'est même bien et, quelquefois, très bien. Ses qualités exceptionnelles lui permettent en vérité de courir partout, pourvu qu'il reste dans le secteur offensif. Quand il dépanne à droite, il crée l'illusion qu'il excelle. Mais une chose est sûre : il n'y exprime pas son talent véritable. C'est un peu comme le grand prix de F1 de Monaco : le cadre est joli, mais un bolide ne pourra jamais dépasser le moindre concurrent. Quel gâchis d'enfermer dans ce genre de circuit de si puissantes machines... !

Dépanner ne doit jamais être une solution, sauf s'il n'y en a aucune autre. Le choix de placer Ribéry à droite m'apparaît comme une erreur. Sans compter que c'est un poste qu'il n'a jamais occupé, sauf, peut-être, si l'on fouille bien son passé messin.

La logique Anelka

Peut-être irrité par les salves de critiques qui l'accusent d'être un coach défensif, Raymond aligne plusieurs attaquants sur la feuille de match. Il tombe alors sur un os car il n'existe qu'une seule place au poste... d'attaquant (1). La décision tombe : ce sera Nicolas Anelka.

AnelkaApplaudissements s'il vous plaît. La titularisation du Blues de Chelsea ne se discute pas. On aime ou on n'aime pas, mais ses sorties en Premier League sont tout simplement excellentes. Rien à dire, si ce n'est qu'aucun autre attaquant français ne l'égale aujourd'hui.

Y a un hic, tout de même... Durant une bonne partie des éliminatoires, Ribéry blessé a été remplacé par... Anelka et c'est Gignac qui enfilait l'habit du n° 9. Remercions le ciel, le Toulousain est effectivement à sa place, lui...

Anelka, milieu offensif droit ? Il a peut-être pour lui une couverture de balle hors-norme, la puissance et une certaine aptitude à provoquer et à éliminer, mais il n'a jamais été moulé à cette fin. Le joueur sait faire de belles choses au milieu du terrain - on l'a même vu, contre l'Irlande, jouer derrière les demis défensifs. La question n'est toutefois pas là. Il ne s'agit pas d'observer ce qu'il accomplit de positif au poste qu'il occupe, mais de savoir si l'on tire le meilleur de lui dans l'équipe. Comme pour Henry à gauche. Comme pour Ribéry à droite.

Le choix de Gignac aussi suscite la réaction. Mais comme la critique est un exercice à la portée de tous, il faut en venir, maintenant, au temps de la reconstruction...

- To be continued... -

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Commentaires
G
La démonstration est excellente et surtout convaincante. J'ai d'ailleurs un peu hâte de lire le fameux temps de la reconstruction... Il serait intéressant d'entendre la réponse de R. Domenech !
J
Moi, j'suis d'accord... Guivarch, quand y marche, y marche, mais quand y marche pas...
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